Politique de la science, quelle histoire?

Pour citer cet article : histcnrs/Politique-science-histoire.html, J-F Picard (mai 2018)



Dans les années 1960, le terme de politique scientifique est utilisé par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour désigner "...les mesures coordonnées que devraient prendre les gouvernements pour promouvoir le développement de la recherche scientifique et guider l'exploitation des résultats de la recherche dans le but de faire progresser la croissance et le bien-être économiques du pays" (1) Politique de la science, ces termes qui fleurent les trente glorieuses rappellent le développement de l'énergie atomique, les débuts de la conquête spatiale et l'essor de la biologie moléculaire. Mais n'évoquent-ils pas la réalité plus ancienne des relations entre la science et la société?  A cette question posée lors d'un colloque organisé pour le cinquantenaire du CNRS en 1989, Charles Gillispie, un historien de l'université Princeton spécialiste du siècle des Lumières, répondait en évoquant le double qualification du mot 'politique' en anglais : 'science politics' renvoyant à l'auto-organisation d'une communauté savante mue par l'avancée des connaissances, 'science policy' à l'action d'agents exterieurs au monde savant, soucieux d'orienter la recherche à des fins utilitaires (2).


Caisses des sciences et instituts scientifiques

Que son financement soit d'origine public ou privé, les premières initiatives pour organiser la recherche ont été confiées la communauté scientifique elle-même. Celles-ci ont essentiellement revétu deux formes, celle de 'caisses des sciences' essentiellement dévolues au soutien de la recherche fondamentale et celle d''instituts' dédiés à ses applications. Ainsi, la vocation d'une caisse des sciences est de soutenir des travaux expérimentaux ou théoriques en vue d'acquérir de nouvelles connaissances indépendamment de tout utilitarisme, en fournissant des bourses à des chercheurs œuvrant dans des laboratoires universitaires, d'où le terme de 'recherche académique'.  En France, telle était la vocation d'une 'Caisse nationale de la recherche scientifique', en Allemagne de la 'Deutsche Forschungsgemeinschaft' (DFG), en Amérique celle de grandes fondations comme la Rockefeller. De son côté, l'organisation d'un institut repose sur l'initiative de scientifiques soucieux d'assurer le développement des applications suscitées par les recherches qu'ils ont menées. Confère l'exemple de Louis Pasteur, le père de la microbiologie qui crée l'institut éponyme grâce à une souscription publique afin de développer la vaccination. Pasteur considèrait comme vaine la distinction faite entre ces deux formes de recherche et l'on connait son célèbre aphorisme :  "il n'y a pas de recherche fondamentale et de  recherche appliquée. Il n'y a que la science et les applications de la science, reliées l'une à l'autre comme un arbre à ses fruits". Ainsi, relève t-on qu'au début du XX°ciècle, cet organisme a pu servir de modèle à des réalisations étrangères, en Amérique au 'Rockefeller Institute for medical research' ou au 'Kaiser Wilhelm Institute für Krankenheiten'
en Allemagne (3).

En France, malgré le précédent pasteurien, la distinction opérée entre l'acquisition des connaissances et la recherche de leurs applications est restée suffisamment prégnante dans le monde savant, pratiquement jusqu'aujourd'hui!, pour
justifier l'organisation du dispositif de la recherche publique. Outre son éloignement des préoccupations de l'industrie, l'une des raisons est à rechercher dans la différence entre un monde anglo-saxon ou germanique dans lequel dès le XIXème siècle l'université est apparue comme le berceau naturel de la recherche fondamentale et la France où l'université impériale fondée par Napoléon a davantage été conçue pour délivrer des certificats de compétence professionnelle, en médecine par exemple, que pour abriter la recherche de laboratoire (4). Fondée sur une  conception philosophique de l'activité scientifique profondément ancrée dans la communauté savante, 'honneur de l'esprit humain' disait le normalien Jean Perrin l'un des fondateurs du CNRS, la recherche a d'abord pris son essor au sein de nobles institutions comme l'Ecole normale supérieure, le Collège de France ou l'Ecole pratique des haute études, en principe éloignées des préoccupations marcantiles de l'industrie.


Les demandes de l'Etat et de l'industrie

Une politique scientifique répond évidemment au souci d'organiser la recherche à des fins utilitaires, une préoccupation initialement liée au développement de l'industrie, particulièrement dans les pays anglo-saxons et en Allemagne. Dans son ouvrage 'The theory of Economic Development', l'économiste Joseph Schumpeter  explique comment l'innovation constitue le moteur d'une économie capitaliste, ce dont il prend pour exemple la deuxième révolution industrielle à la fin du XIX° siècle, celle de la chimie et de l'électricité, laquelle a d'ailleurs moins concerné la France que l'Allemagne ou les Etats-Unis. L'avancée des connaissances (scientific push) étant à l'origine de procédés techniques qui suscitent en retour de nouvelles avancées scientifiques (demand pull), il cite le cas de Thomas Edison, le prolifique inventeur des premières applications industrielles de l'électricité, à l'origine de la firme 'General Electric C°' dont un patron, Irving Langmuir, sera d'ailleurs nobélisé. De même en Allemagne, l'essor de l'industrie chimique
a reposé sur des recherches menées dans les laboratoires des firmes Bayer ou I.G. Farben (5).

Quant à l'Etat, outre le souci récurrent d'accroitre ses capacités militaires grâce aux progrès de l'artillerie et de la navigation,  il s'est largement impliqué dans la mise en œuvre de politiques scientifiques au cours grands conflits qui ont émaillé le XX° siècle où les nécessités de la mobilisation scientifique ont suscité la création d'organismes spécifiques. Pendant la Grande Guerre, en France un 'Service des inventions' permet à Paul Langevin de mettre au point la détection par ultra-sons ou au général Gustave Férrié de développer la TSF (6). A la veille de la Seconde Guerre mondiale, la création du CNRS s'inscrit  dans cette logique de mobilisation scientifique, tandis que dans l'Amérique en guerre, un 'Office of scientific and research development' supervise le programme Manhattan ou la fabrication de la pénicilline
pour devenir, une fois la paix revenue, la 'National Science Foundation' (NSF). Dans la même logique, l'année 1959 voit en France la création d'une Délégation générale à la recherche scientifique et technique (DGRST) dans un contexte de guerre froide, mais qui s'inscrit aussi dans un pays de forte tradition de dirigisme économique (7).  Dans ce cas, le financement de la recherche peut devenir l'objet de choix politiques soulignait Pierre Aigrain lors du cinquantenaire du CNRS. "Quand peut-on parler de politique de la science? demande celui qui en fut responsable au tournant des années 1970. Je ferais une simple remarque. A partir du moment où il y a un bailleur de fonds - et jusqu'à nouvel ordre, il s'est révélé extrêmement difficile de faire de la recherche sans argent -, il y a toujours quelqu'un qui sera amené à en assurer le financement. Donc, s'il y a une politique de la science, il y a nécessairement des critères selon lesquels les gens chargés du financement de la recherche - soit des mécènes, mais plus fréquemment les contribuables - seront amenées à juger de l'utilisation de leur argent" (8) Notons que le financement de la recherche fondamentale s'opère plus facilement au niveau international que dans le cas des applications. Ainsi, dans les années 1950, la participation de la France au 'Centre Européen de recherche nucléaire' procèdait du souci d'assurer le financement des grands accélérateurs de particule, mais l''Euratom' lancé à l'initiative de la Communauté européenne, tandis que quelques années plus tard,  la valorisation de la recherche se heurtait aux réticences de notre pays à partager son savoir faire dans les utilisations civiles et militaires de l'énergie atomique.

Quels que soient ses mobiles, une politique de la science se situe au cœur des relations entre la science et la société. C'est ce que l'on voudrait évoquer ici en suivant les trois phases qui caractérisent le cas de la France. Une première période de 1939 à 1959 voit la création et l'essor du Centre national de la recherche scientifique en confiant
son pilotage à la communauté scientifique. Mais cette disposition qui consistait à marier une caisse des sciences avec un opérateur de recherche, autrement dit un CNRS et un CNRSAppliqué, ayant montré ses limites, les décennies suivantes voient l'Etat faire le choix d'une politique volontariste confiée à une nouvelle administration (la DGRST) censée soutenir la croissance économique dans un contexte d'indépendance nationale. Enfin, au tournant du troisième millénaire lorsque s'ouvre l'ère des technosciences, les pouvoirs publics sont conduits à s'interroger sur la pertinence d'une politique scientifique désormais inscrite dans un espace mondialisé envahi par la technologie. Le CNRS cède alors à l''Agence nationale de la recherche'  chargée de contractualiser l'activité scientifique dans le cadre de rapprochements publics - privés et d'initiatives internationales.


Comment 'une' caisse des sciences devint 'le' CNRS

Dans l'entre-deux-guerres, la Troisième République radicale-socialiste et franc-maçonne décide d'installer une 'Caisse nationale de la recherche scientifique'. Le mentor de l'opération, le physicien Jean Perrin (Nobel 1926), l'un des fondateurs du CNRS, n'hésitait pas à exprimer la conviction que la science constituait le principal facteur du progrès humain : «rapidement, peut être seulement dans quelques décades, si nous consentons au léger sacrifice nécessaire (pour l'organiser), les hommes libérés par la science vivront joyeux et sains, développés jusqu'aux limites de ce que peut donner leur cerveau... ce sera un Eden qu'il faut situer dans l'avenir au lieu de l'imaginer dans un passé qui fut misérable.../ Tout le problème de l'organisation scientifique consiste à trouver les jeunes esprits qui pourront devenir 'Ampère' ou 'Pasteur', poursuit Perrin. Le hasard n'y peut suffire et il faut y aider comme un bon jardinier qui sait reconnaître et protéger, dans des champs d'herbes folles, les jeunes plantes qui deviendront des arbres puissants...» [9]. 'La' CNRS regroupe ainsi plusieurs sources de financement installées depuis le début du siècle (caisse de la recherche scientifique, taxe Borel, etc.) en vue de fournir des bourses à des jeunes chercheurs. Elle est placée sous la tutelle de l'Education nationale, le directeur des Enseignements supérieurs ayant tenu à préciser que : «...quel que soit son effort, l'Etat ne croit pas devoir intervenir pour imposer un programme ou des directives précises. L'orientation de la recherche, c'est aux savants qu'il appartient de la faire. Ce principe de liberté est à la base de l'organisation de la recherche scientifique en France» (10)

Cependant, la Cour des Comptes suggère de rationnaliser les modes de financement des divers organismes scientifiques qui cohabitent en France. Lors du débat budgétaire de décembre 1936 à l'occasion duquel il utilise pour la première fois le terme de 'politique de la science', le ministre de l'Education nationale, Jean Zay, décide l'installation d'un organisme centralisé dont il confie la direction au physiologiste Henri Laugier. Sa mission est de coordonner l'ensemble de la recherche publique et d'installer de nouveaux laboratoires, par exemple en astrophysique une discipline en plein essor. C'est ainsi qu'en octobre 1939, le 'Centre national de la recherche scientifique' fusionne 'la' Caisse nationale de la recherche scientifique avec le CNRSA issu d'un 'Office national de la recherche scientifique et des inventions' (ONRSI) installé à Meudon-Bellevue au lendemain de la Grande Guerre. Dirigé par le physicien Henri Longchambon, le CNRS (appliqué) est chargé de programmer la recherche dans un contexte de mobilisation scientifique. Parmi quelques autres, un exemple significatif de ce pilotage de la recherche est le lancement du programme atomique confié à Frédéric Joliot, le chercheur nobélisé avec son épouse Irène Curie en 1935 pour la découverte de la radioactivité artificielle. Le CNRS installe à Ivry un Laboratoire de synthèse atomique où Joliot et son équipe démontrent la possibilité d'une réaction en chaine provoquée par la fission de l'uranium. Durant l'hiver de la drôle de guerre, ces travaux soutenu par le ministère de l'Armement amorcent le premier programme
lancé dans le monde pour domestiquer l'energie atomique et fabriquer une bombe atomique, mais ils sont évidemment suspendus par la défaite de 1940 qui voit le CNRS subir le contre coup des événements (11).  Au lendemain de l'armistice, le régime de Vichy envisage de supprimer cette 'créature du Front populaire' et destitue ses deux premiers directeurs. Mais le géologue Charles Jacob qui les remplace obtient son maintien, justifié par la nécessité de remédier aux pénuries de l'occupation, c'est-à-dire de soutenir des recherches appliquées (erzats alimentaires, carburants de substitutions, etc.). A la Libération, Jacob à son tour cède la place à Joliot, tout aussi convaincu que son prédécesseur de l'intrication nécessaire de la recherche fondamentale et des applications, même si ses accointances idéologiques sont d'une autre nature. Joliot propose de détacher le CNRS de l'Education nationale pour le lier au chef de gouvernement, seule instance capable de mettre en oeuvre la mobilisation scientifique dont la guerre vient de révéler l'importance. Mais il se heurte au refus d'un monde universitaire, omniprésent dans son comité directeur, soucieux de revenir au dispositif d'un 'CNRS caisse des sciences' installé une dizaine d'années auparavant pour répondre aux sollicitations de la recherche académique (12).


La césure recherche fondamentale - recherches appliquées


En 1946, alors que Joliot quitte le CNRS pour participer à la création du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), le généticien Georges Teissier lui succède, un pur universitaire décide en effet de rendre au CNRS sa vocation initiale, c'est-à-dire au soutien à la science 'pure' et il fixe ce qui restera le 'vade me cum' de l'institution, pratiquement jusqu'à nos jours : «Un reproche souvent fait aux scientifiques français est d'avoir résolument ignoré la science appliquée. Mais il  ne faudrait pas que, tombant d'un excès dans l'autre, on sacrifie au bénéfice de la recherche technique, la recherche pure qui, seule, prépare l'avenir.../ Il faut sans aucun doute développer la recherche technique redoutablement déficiente chez nous, mais il ne faut pas que son développement ait priorité sur celui de la recherche scientifique. Il ne faut  pas qu'une politique stupidement utilitaire prétende discriminer parmi les disciplines scientifiques, celles qui sont rentables et celles qui ne le sont pas. Il ne faut pas, enfin, que le contrôle nécessaire de ces activités de recherche soit abandonné aux financiers ou aux économistes». C'est ainsi que le 
Comité national du CNRS censé représenter l'ensemble de la communauté scientifique disposera de la haute main sur les crédits de la recherche académique (13).

Placé sous la tutelle de l'Education nationale, l'organisme s'est en outre révélé démuni face à d'autres administrations disposant des moyens budgétaires nécessaires au développement de leurs propres services de recherche. Ainsi, poussées par les contraintes de l'occupation puis par l'élan de la reconstruction, les années 1940 voient l'installation de nouveaux organismes, presque tous restés actifs jusqu'à aujourd'hui, l'INH, le CNET, l'INRA, etc. parmi lesquels le Commissariat à l'energie atomique (CEA) directement  rattaché au chef du gouvernement, le Général de Gaulle, selon le voeu de ses promoteurs.



Source : http://www.histcnrs.fr/cnet/CNET.xhtml

Dès lors, la recherche fondamentale et les recherches appliquées, la R&D (acronyme de recherche et développement) sont appelées à suivre deux voies séparées. Doté des ses débuts d'un budget équivalent à celui du CNRS, en relation avec Electricité de France (EDF), une entreprise nationalisé qui vient de se doter d'une 'Direction des études et recherches', le CEA est chargé de développer l'énergie électro-nucléaire avant de fabriquer une bombe atomique (14). En 1954, le président du Conseil Pierre Mendès-France confie à Henri Longchambon un secrétariat d'Etat qui intalle un 'Conseil supérieur de la recherche scientifique et du progrès technique' censé coordonner la recherche publique dans une IVème République, malheureusement handicapée par son instabilité ministérielle et  des moyens budgétaires  obérés par les crédits dévolus aux guerres coloniales (15). Cependant la modernisation du pays s'amorçe de manière significative ainsi qu'en temoignent dès le milieu des années 1950 l'industrie aéronautique avec la fabrication de la 'Caravelle' et le lancement des premiers réacteurs nucléaires electrogènes par le CEA. La recherche académique n'est pas en reste, en 1956 le colloque de Caen réunit un groupe de sommités scientifiques, le mathématicien André Lichnérowicz, le pasteurien Jacques Monod qui avec, ses collègues André Lwoff et François Jacob réalise des travaux de génétique bactérienne à la source d'une nouvelle discipline, la biologie moléculaire. On y discute d'un plan de modernisation de l'université, mais avec une représentation a minima du CNRS ou de l'INH qui semblent curieusement éloignés de cette entreprise. En fait, sous la houlette de Robert Debré et de son cadet Jean Dausset, la principale retombée du colloque de Caen concernera la faculté de médecine pour aboutir en 1958 à la réforme hospitalo-universitaire, inspirée par celle menée aux Etats-Unis un demi-siècle plus tôt en vue d'assurer la trilogie 'soins-enseignement-recherche' indispensable au progrès médical (16)


Le pilotage par l'aval

"Dans l'histoire de la recherche scientifique en France écrit Antoine Prost l'avènement de la V° République est un moment charniè̀re où s'infléchit pour une dizaine d'années la politique gouvernementale. La recherche scientifique se voit reconnaître une importance majeure dans le progrès économique et social du pays. Bien plus, aux yeux du Général de Gaulle, elle est indispensable à l'indépendance et à la grandeur nationales. Il ne suffit donc pas de lui accorder des moyens humains et matériels massivement accrus, elle doit faire l'objet d'une action publique volontaire, délibérée et méthodique. C'est une véritable politique de la recherche scientifique et technique qui apparaît alors"(17). Convaincu que la place  d'une nation dans le monde se mesure à l'aune de ses capacités de développement, le Général de Gaulle a réuni un Comité interministériel de la recherche scientifique (Comité des Sages) pour lui confier le soin de piloter l'ensemble de la recherche publique. Il réunit un certain nombre de responsable des réformes amorcées sous la république précédente. Pierre Aigrain et Maurice Ponte de la société CSF, le pr. Jean Bernard de l'hôpital Saint-Louis, Raymond Latarjet de l'Institut du radium, le mathématicien André Lichnérowicz du Collège de France ou Pierre Taranger, le directeur industriel du CEA (18). Le lien est assuré avec le Commissariat au Plan, issu de l'EDF, Pierre Massé nommé par le général de Gaulle pour promouvoir "...l'ardente obligation de poursuivre les grandes tâches nationales qui dépassent les destins individuels.../ [I.e.] assurer le doublement des crédits de recherche scientifique et technique  et  la modernisation de notre armement" (19).

Le souci d''indépendance nationale repose sur le développement d'un 'complexe militaro-industriel', un terme précédemment utilisé en Amérique par le président Eisenhower dans le contexte de la guerre froide. En France, une Délégation générale pour l'armement (DGA) installée en 1961 est chargée de développer les fonctions d'ingéniérie dans les arsenaux et de soutenir des recherches dans les laboratoires du CNRS et autres. Au centre de ce complexe , sous la direction de Pierre Guillaumat, le CEA lance la construction de l'usine d'enrichissement d'uranium de Pierrelatte et sa Direction des applications militaires (DAM) est chargée de mettre au point la bombe H et la propulsion des sous-marins atomiques. Le développement des dispositifs techniques nécessaires (électronique, automatismes, etc.) est effectué dans les laboratoires du Commissariat, comme le '
Laboratoire d’électronique de technologie de l’information' (LETI) installé au Centre d'études nucléaires de Grenoble (CEN-G). L'industrie spatiale a bénéficié de la sollicitude de la V° République pour les mêmes raisons stratégiques, mais avec, à terme, une diversification internationale. Rattachés directement au ministre chargé de la recherche, le Centre national d'études spatiales (CNES) est créé en 1961 avec l'objectif de réaliser un lanceur extra-atmosphérique, donc un missile balistique inter continental. Après quelques mécomptes dus aux défaillances d'une fusée britannique, la réussite de Diamant et du satellite Asterix conduira le CNES à participer à la fondation de l'Agence spatiale européenne (ESA) dont sont issues la fusée Ariane et la base de lancement de Kourou en Guyane. La lancement de ce programme spatial, puis le développement du dispositif de recherche-développement afférant, représente ainsi la réussite majeure d'une politique de recherche européenne. Dans la même logique, le 'Centre national pour l'exploitation des océans' (CNEXO, aujourd'hui 'Ifremer') est créé en 1967 en vue de coordonner l'activité des laboratoires océanographiques et autres activités halieutiques.


 
(Source : Notes et Etudes doc. 1961, La Documentation française)

Réuni dès les débuts de la V° République, le Comité des Sages devenu par la suite Comité consultatif de la recherche scientifique et technique (CCRST) est épaulé par une Délégation générale à la recherche scientifique et technique (DGRST) chargée d'assurer le pouvoir executif de la nouvelle administration. En concertation avec le Commissariat au plan, ce dispositif est chargé de gérer l''Enveloppe-recherche', c'est-à-dire l'ensemble des crédits destinés aux différents ministères, soit un budget d'un peu plus de 400 MF de francs courants entre 1961 et 1965, ventilé comme suit :


(Ibidem)

Cette présentation du budget civil de la recherche (BCRD) appelle quelques commentaires. On note que les sciences de la vie, recherche médicale incluse, représentent  près du tiers de l'envoloppe recherche, tandis que dans l'histogramme consacré aux sciences physiques et chimiques relève la présence de domaines relevant davantage de la valorisation de la recherche (électronique et calculateurs, conversion de l'énergie,...) que de la recherche fondamentale. Dotée d'un budget spécifique (le Fond recherche), la DGRST lance aussi des 'actions concertées' censées soutenir des domaines où les Sages estiment que la recherche française pâtit d'un certain retard. De manière significative, sur les dix premières actions lancées au début des années 1960
(20), la moitié concernent le secteur des sciences de la vie, notamment celle de biologie moléculaire confiée au pasteurien Jacques Monod. Une réussite exemplaire à plusieurs titres, outre l'introduction de la nouvelle discipline dans le milieu scientifiquement conservateurs des sciences naturelles à l'université et au Museum, dans le prolongement de la réforme hospitalo-universitaire, en 1964 elle suscite la transformation de l'INH en 'Institut national de la santé et de la recherche médicale' (Inserm) où des 'actions thématiques programmées' inspirées de la DGRST amorce le développement d'une médecine moléculaire qui étend son hégémonie sur les sciences de la vie (21).

Pourtant, cette politique scientifique volontariste a rencontré quelques mécomptes. En 1964, Gaston Palewski le ministre délégué à la recherche annonce le lancement d'un 'Plan Calcul' afin de doter le pays d'une industrie informatique. L'installation d'un 'Institut de recherche en informatique et automatique' (I.R.I.A.). suscite en relation avec le CEA, la création d'une 'Compagnie internationale pour l'informatique' (CII) et à la fabrication d'un ordinateur de conception nationale ('Iris 80'). Mais ayant davantage misé sur le développement de calculateurs (hardware)  plutot que sur les programmes informatiques
(software), le plan subit d'important retards qui obligent les utilisateurs d'informatique lourde à recourir aux produits de l'américain IBM, avant d'aboutir à la fusion CII - Honeywell Bull. Devenu institut national, dans les années 1970, l'INRIA participe avec le Centre national des télécoms (CNET) au développement de la télématique, lancement de C.I.T.-Alcatel avec le Minitel qui repose sur la  connexion de terminaux d'ordinateurs via le réseau téléphonique (22). Si le colbertisme scientifique a réussi à doter le pays du dispositif de R&D nécessaire à sa modernisation, il convient d'y inclure le rôle des grandes entreprises publiques, celui d'EDF pour le développement de l'énergie électro-nucléaire ou de la SNCF avec le TGV (23), voire d'Aérospatiale (ex-Sud Aviation) dans le succès d'Airbus. Cette 'stratégie de l'arsenal' menée avec succès au profit des grands systèmes techniques et  du complexe militaro-industriel, a été analysée par Jean-Jacques Salomon qui en a néanmoins tracé certaines limites économiques. Ainsi, la sophistication de l'ingéniérie d'EDF ou de la SNCF et sa contre-partie en terme de coûts ont rendu problématique l'exportation des centrales nucléaires ou du TGV qui nécessite pour donner toute sa mesure d'importants travaux de Génie civil. De même, en matière de communications le sevoir faire des ingénieurs des télécoms qui a permis le développement du minitel n'a pas suscité dans notre pays la fabrication de produits micro-informatiques de grande consommation (24)


Le paradoxe des EPST

Comment le CNRS s'est-il adapté au contexte dirigiste initié par la V° République?  Malgré son incapacité à la programmation scientifique telle qu'elle a été évoquée plus haut, mais défendu par l'Education nationale soucieuse d'en garder la tutelle,
l'organisme a bénéficié de la hausse de dotations budgétaires inscrites dans l'enveloppe-recherche. Un train de réformes lancé en 1966 aboutit au lancement du dispositif des laboratoires associés, puis des équipes de recherche associées, en confirmant les liens du CNRS avec la recherche universitaire. En revanche la création en son sein de départements scientifiques (physique, chimie, astro-géophysique, sciences de la vie, sciences humaines et sociales) censés améliorer ses capacités de pilotage ont exacerbé les relations entre sa direction et son Comité national où les représentant des chercheurs restent les défenseurs intransigeants de la liberté de la recherche, d'où les difficultés rencontrées dans les années 1970 lors du lancement des 'actions thématiques programmées' (ATP) ou de 'programmes interdisciplinaires de recherche' (PIR) (25).

En 1981, l'élection du président Mitterrand avec l'arrivée de la Gauche aux affaires s'inscrit, au moins dans un premier temps, dans l'esprit du Front populaire qui avait installé le CNRS un demi-siècle auparavant. En même temps se révèle un curieux paradoxe. Alors que Jean-Pierre Chevènement se voit confier un nouveau Ministère de la Recherche et de la Technologie (MRT) censé rapporcher ces deux pans de l'activité scientifique en assurant la tutelle du CNRS et de l'Inserm (restés jusque-là sous celles de l'Education nationale et de la Santé), un chercheur de l'Inserm, Philippe Lazar, est chargé d'organiser des assises de la recherche au cours desquelles le 'Syndicat national de la recherche scientifique' (SNCS) dénonce son pilotage par l'aval après avoir obtenu la démission des directeurs du CNRS et de l'Inserm, coupables de s'être soumis dans les années 1970 : "...aux objectifs du gouvernement Giscard-Barre, c'est-à-dire aux intérêts des grands trusts privés et aux impératifs idéologiques du conservatisme" (26).  En conséquence, les assises débouchent sur une loi d'orientation qui établit le statut d'établissements publics scientifiques et techniques (EPST, 1982) en l'accompagnant d'une fonctionnarisation des chercheurs, une mesure censée préserver leur activité des pressions du monde économique.

Mais il apparait bientôt que le refus de programmer la recherche au nom de son indispensable liberté n'a guère favorisé les capacités des EPST à suivre les évolutions de la conjoncture scientifique, suscitant en retour l'apparition de nouveaux organismes
. Lorsque éclate l'épidémie de sida, Philippe Lazar qui vient d'être nommé à la tête de l'Inserm où il a supprimé le dispositif des 'actions thématiques programmées', décide de suivre l'avis de son comité de direction (CODIS) qui estime que l'épidémie relève plus d'un problème de santé publique que de la recherche médicale. Malgré la réunion d'un comité interministériel à l'initiative du ministère de la Santé en juillet 1982, voire des mises en garde de certains cliniciens à propos du risque de contamination liés à la transfusion sanguine, l'Inserm rechigne à s'engager dans un programme de recherche initié par l'Institut Pasteur. Ce comportement dilatoire suscitera ainsi l'apparition de nouveaux opérateurs, des associations de malades dont l'activisme se révélera précieux lors de la mise au point des premières thérapeutiques, tandis qu'à la suite de l'affaire du sang contaminé, le ministère de la Recherche qui s'est doté d'un mode d'intervention direct - les groupements d'intérêt public (GIP) - installe en 1988 une 'Agence nationale de la recherche sur le sida' (ANRS) indépendante de l'Inserm, censée assurer les liens nécessaires entre la recherche médicale, les hôpitaux universitaires et l'industrie pharmaceutique (27).

De même, le décryptage du génome humain illustre un autre paradoxe du fonctionnement des établissements publics. Alors qu'au pays de la libre entreprise le 'Human Genome Program' (HGP) est une initiative de l'administration américaine (Dept. of Energy), en France à la fin des années 1980, l'absence des EPST dans l'affaire suscite l'initiative d'une fondation de droit privé, le 'Centre d'étude du polymorphisme humain' (CEPH) et de l''Association française de lutte contre les myopathies' (AFM). En effet, outre ses réticences vis-à-vis de la recherche programmée, l'Inserm refuse de divertir une partie de son budget vers une opération qui requiert des moyens d'investigations lourds et rapproche la biologie de la 'big science'. Confronté à la fin de non recevoir opposée aux demandes des chercheurs et grâce aux moyens financiers que lui procure son Téléthon, l'AFM prend l'iniative de regrouper un ensemble de laboratoires au sein d'un 'Généthon' qui mènera à bien la cartographie du génome humain.  Du côté du CNRS, à l'instigation du ministère de la Recherche, un GIP 'Groupement de recherche pour l'étude des génomes' (GREG) est installé sur le campus de Gif s/Yvette. Confié à Piotr Slonimski en 1992, un généticien ouvertement hostile à toute forme de recherches appliquées (28), le GREG délaisse sciemment le génome humain et ses usages en médecine pour s'intéresser au séquençage des bactéries et à la bioinformatique. Moyennant quoi, en concertation avec l'AFM-Généthon, le ministère de la Recherche finit par lui substituer le Génopole d'Evry, un GIP conçu par Pierre Tambourin comme un incubateur de 'startups' biotechnologiques (29).



Technosciences et organisation de la recherche dans un espace mondialisé
 
Nanosciences, biotechnologies, informatique, communications-neurosciences, au tournant du troisième millénaire les 'NBIC' ont fait entrer le monde dans l'ère des technosciences, suscitant l'essor d'une économie de l'innovation ainsi qu'une vague de publications sociologiques censés analyser les nouveaux rapports de plus en plus étroits tressés entre la science et la société (30). "il est peu de découvertes scientifiques qui ne se monnaient aujourd’hui presque aussitôt en spectaculaires retombées technologiques, peu de découvertes scientifiques qui n’empruntent à une technologie leurs conditions mêmes de possibilité.  L’opposition grecque entre une épistémè contemplative, désintéressée et une technè utilitaire, active, débrouillarde et pratique ne nous parle plus; seule la nature de cette liaison pose aujourd'hui problème" écrit le philosophe Jean-Pierre Séris, faisant allusion au mouvement écologique. Deux principes se trouvent désormais au centre de  l'activité scientifique : l'opérativité et la circularité qui réduisent de facto la distinction opérée entre la recherche fondamentale et ses applications. "La science ne se contente plus d'observer le réel, elle l'utilise, le modifie, l'enrichit (nouveaux matériaux, biologie de synthèse,...) et la technique produit des outils qui permettent de savoir plus et mieux (informatique et big data)" (31). Or, comme le soulignait déjà Louis Pasteur avant d'installer l'institut éponyme (cf. supra), si une logique intrinsèque explique l'avancée des connaissances, les choix d'orientations scientifiques qu'ils soient de nature endogène ou externes apparaissent moins déterminants que l'organisation du dispositif censé les guider. Alors que se multiplie le nombre d'opérateurs issus du privé dans le domaine techno-scientifique (multinationales, 'startups', voire associations d'usagers), le fonctionnement des établissements publics est mis sur la sellette par les audits de la Cour des Comptes. En 2004 l'Académie des Sciences fustige à son tour : "la caducité des dispositions d'un emploi fonctionnarisé (et) la confusion généralisée des rôles entre les opérateurs et les agences de moyens" (32), autrement dit, elle stigmatise le fonctionnement d'un CNRS où la revendication de liberté de la recherche ressemble désormais davantage à la défense d'intérêts corporatistes que répondre à la réalité de l'activité scientifique.

Au ministère de tutelle,
inspiré par les modes de fonctionnement du CEA dont il prendra bientôt la tête, Bernard Bigot la directeur de la recherche et de la technologie prépare une nouvelle loi d'orientation destinée à prendre le contre-pied de celle de 1982. En effet, poussé dès sa naissance par le besoin de disposer de l'appareillage nécessaire au développement de l'industrie nucléaire, en réussissant à intégrer une recherche fondamentale de qualité avec les multiples développements technologiques ainsi suscités, le CEA s'est progressivement doté des compétences en matière de R&D étendues à des domaines comme l'informatique ou la biologie (33). Au tournant des années 1990, la remise en cause de ses missions initiales, l'aboutissement des programmes militaires et le transfert des compétences électro-nucléaires à EDF et Areva, a permis à  André Syrota de développer ces capacités d'intégration au profit du département des sciences du vivant (DSV) qu'il dirige. En matière de 'NBIC', un exemple significatif de valorisation au profit de la recherche fondamentale concerne la mise au point d'un test de dépistage des prions à l''Institut de biologie et de technologies' de Saclay, dont les 70 M€ de redevance permettent d'installer 'Neurospin' où l'on développe l'imagerie fonctionnelle à usage des neurosciences.

Inscrite dans la nouvelle loi d'orientation, en 2005 l'Agence nationale de la recherche (ANR) est mise en place au ministère de la Recherche par Gilles Bloch, un ancien responsable du DSV-CEA (34). Le maitre mot de la nouvelle agence est la contractualisation de la recherche. Il lui revient d'assurer la disposition des crédits de programmations destinés aux EPST (CNRS, Inserm et autres) qui se trouvent ainsi dépossédés d'une part de leurs prérogatives. Il s'agit de les inciter à développer des coopérations inter-organismes, tout en "ciblant les efforts sur des priorités économiques et sociétales définies par l'Etat " (35). A cette fin, André Syrota nommé à la direction de l'Inserm, crée avec son adjoint Thierry Damerval (un autre ancien du CEA) l'Alliance pour les sciences du vivant et de la santé' (AVIESAN) chargée  de coordonner les activités du CEA, de l'Inserm, du CNRS, de l'Institut Pasteur, de l'INRA, de l'Assistance publique (AP-HP) et de l'industrie pharmaceutique dans la perspective de programmes de recherche interdisciplinaires. L'autre mission dévolue à l'ANR consiste à intensifier les liens entre la recherche publique et le secteur privé, notamment à destination des petites et moyennes entreprises, comme cela est préconisé dans un rapport du PDG de Saint-Gobin (J-L. Beffa), autrement dit à valoriser la recherche dans un secteur défavorisé en France, contrairement à l'Allemagne (35). Quant à
l'évaluation scientifique qui s'applique désormais à des unités de recherche ou à des institutions et non plus à l'activité de chercheurs individuels comme dans les EPST (cf. note 13), globalement inscrite dans des critères incontournables de comparaisons internationales (Thomson Reuters, ARWU ShanghaÏ), elle est confiée à un 'Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur' (HCERES).

En revanche, les efforts récurrents pour rapprocher la recherche et l'enseignement supérieur au sein d'une même organisation se heurtent aux réticences des intéressés. En 2015, le projet de Communautés d'universités et d'établissements (COMUE) cherche à réduire le dualisme évoqué en liminaires entre les universités et les grandes écoles. L
e projet d'une 'integrated research intensive university' Paris-Saclay est censé réunir les université d'Orsay, de Saint-Quentin en Yvelines et d'Evry, avec les grandes écoles, Polytechnique, Centrale, Supélec, HEC, le CEA et les EPST. Mais les écoles d'ingénieurs renâclent à se lier à un monde universitaire en voie de massification et largement privé de capacités de sélection (36). Tandis que la COMUE Paris-Saclay semble devoir se limiter à la réunion des trois universités concernées avec l'ENS-Cachan, une alliance des grandes écoles se constitue en dehors du comité dans le sillage de l'Ecole polytechnique qui a lancé le mouvement (37). Les difficultés rencontrées par la communauté Paris-Saclay ne sont pas uniques et la généralisation d'un dispositif qui semble pourtant avoir porté ses fruits dans le secteur bio-médical en rapprochant l'enseignement supérieur de la recherche (38), pourrait être ailleurs l'une des pierres d'achoppement de cette réorganisation.

 

Notes

(1) Grove J. W., 'Politique scientifique', Encyclopédie canadienne, 2006 <www.encyclopediecanadienne.ca/fr/article/politique-scientifique/>
(2) Papon P, Gillispie C, Aux origines du CNRS, Cahiers pour l'histoire du CNRS, 6-1989
(3) Caisses et instituts impliquent des formes de gouvernance spécifiques. Dans le cas d'une caisse des sciences, le pouvoir est parfois confié à une représentation étendue de la communauté scientifique, comme ce sera le cas du Comité national au CNRS. Dans celui d'un institut ou d'une fondation, il est plus fréquement dévolu à une direction collective, directoire ou conseil d'administration comme le 'Board' de la fondation Rockefeller.
Picard J-F, 'La Fondation Rockefeller et la recherche médicale', Paris, PUF 1999
(4) Prost A., 'Histoire de l'enseignement en France', Paris, A. Colin, 1968.
(5) Schumpeter J., 'The theory of Economic Development', Harvard U. Press, 1934. Voir aussi Caron F., 'Le résistible déclin des sociétés industrielles', Paris, Perrin, 1985 (réed. 1993)
(6) Breton, J-L, 'Les inventions réalisées pour la Défense nationale', La Science et la Vie, 48-50, Déc. 1919, Janv. 1920
(7) Kuisel, Richard F., 'Le capitalisme et l'État en France ; modernisation et dirigisme au XXe siècle' , Paris, Gallimard, 1984
(8) Aigrain P., Paul H., 'Le CNRS moyen d'une politique de la science', Cahiers pour l'histoire du CNRS, 6-1989
(9) Perrin J., 'La recherche scientifique', Paris, Hermann, 1933
(10) Cavalier J. directeur de l'Enseignement supérieur, note au ministre de l'Education nationale, janv. 1935 (Arch. CNRS, AN 80284 - 1)
(11) Nahmias, M-E., 'Vers l'utilisation de l'énergie atomique : la rupture explosive du noyau d'uranium', La Science et la Vie, 273, mars 1940
(12) Joliot F, réunion du comité de direction du CNRS, 18 sept. 1944 (arch. CNRS, AN 80284 - 205).
A la Libération, Joliot a mobilisé le CNRS en envoyant une mission de récupération de matériel scientifique en Allemagne et en installant à l'instigation du pasteurien Louis Rapkine un groupe de recherche opérationnelle à Londres en vue de s'informer des avancées scientifiques réalisées chez les Alliés, Picard J-F, 'La République des Savants, le CNRS et la recherche française', Flammarion, 1990. Pour une biographie de Joliot, voir Pinault M., 'Frédéric Joliot Curie', Paris, O. Jacob, 2000. Voir aussi Picard J-F, Pradoura E., 'La longue marche vers le CNRS (1901 - 1945), Cahiers pour l'histoire du CNRS, 1 - 1988.
(13) Teissier G.,  'Une politique française de la science', conf. à l'Union Française Universitaire, 21 juin 1946 (arch. CNRS, AN 80284). Voir aussi 'Histoire d'un parlement de la science. Le Comité national du CNRS'  (Histcnrs, 2018)
(14) Dès sa seconde année d'activité, le budget du CEA égale celui du CNRS (1 et 1 MdF courant),  ONERA (3MdF), min. Industrie (4MdF). Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics, Rapport sur la recherche scientifique et technique». Séance du 17 mars 1948. (AN F60 , 942). Voir aussi Picard J F Recherche et Industrie. 'Témoignages sur quarante ans d'études et de recherches à Electricité de France', Paris, Eyrolles ,1987
(15) Prost A, Les origines de la politique de la recherche en France, 1939 - 1958, Cahiers pour l'histoire du CNRS, 1-1988
(16)
Colloque de Caen, 1-3 novembre 1956, 'Communication sur l'organisation de la recherche médicale française' présentée par les Pr. Robert Debré et René Fauvert et le Dr. Jean Dausset, voir aussi Les réformes de l'enseignement de la médecine à travers les archives du Ministère de l'éducation nationale (1905-1970)
(17) Prost A, 'Les réformes du CNRS 1959 1966',  Cahiers pour l'histoire du CNRS, 10-1990
(18)  'La V° République a choisi ses savants', S&V, 497, fev. 1959
(19) Massé P., 'Aléas et progrès. Entre Candide et Cassandre', Paris, Economica, 1984. Voir aussi Duclert V et Chatriot A (eds.) 'Le gouvernement de la recherche. Histoire d’un engagement politique, de Pierre Mendès France au général de Gaulle (1953-1969)', Paris, La Découverte, 2006.
(20) Les dix premières actions concertées lancées en 1960 par la DGRST : 'Conversion des énergies' (magnéto hydro dynamique), 'Biologie moléculaire' (J Monod, G Mathé), 'Cancer et leucémie' (pr. J. Bernard), 'Applications de la génétique' (agronomie), 'Nutrition animale et humaine', 'Fonctions et maladies du cerveau', 'Exploitation des océans' (IFREMER devient CNEXO), 'Analyse démographique, économique et sociale' (enquête de Plovezet du dr. Gessain), 'Science économique et problème de développement', 'Documentation'
(21) De l'INH à l'Aviesan en passant par l'Inserm, l'organisation de la recherche médicale en France (HISTRECMED 10 - 2017)
(22) Beltran A., Griset P., 'Histoire d'un pionnier de l'informatique, 40 ans de recherche à l'Inria', Paris, EDP sciences, 2007
(23) Picard J-F, Beltran A. et Bungener M, (pref. de J. Bouvier) 'Histoire(s) de l'EDF, comment se sont prises les décisions de 1946 à nos jours',   Paris, Dunod, 1984 et Picard J-F, Beltran A., 'D'où viens tu TGV? Témoignages sur l'origine des trains à grande vitesse français', RGCF, h. s. 1994
(24) Salomon J. J., 'Le Gaulois, le Cow-boy et le Samouraï. Réflexions sur la politique française de la technologie', Paris, Economica, 1986. Voir aussi 'L'OCDE et les politiques scientifiques, entretien avec Jean-Jacques Salomon' (M. Leroux et G. Ramunni), La Revue pour l'histoire du CNRS, 3-2000.

(25)
'Histoire d'un parlement de la science. Le Comité national du CNRS' (Histcnrs, 2018)
(26)  'Un syndicat de chercheurs demande la démission des directions de l'Inserm et du CNRS', Le Monde, 9 juil. 1981
(27) 'Le sida, autopsie d'une épidémie' (HISTRECMED., 7-2017)
(28) Voir le discours de Piotr Slonimski à l'occasion de la remise de sa médaille d'or du CNRS en octobre 1985
(29) 'Le programme génome humain et la médecine, une histoire française', (HISTRECMED, 2-2017)
(30) Voir par exemple Latour B., 'Science in Action, How to Follow Scientists and Engineers through Society', Cambridge, Harvard U. Press, 1987 ou 'Histoire des sciences et des savoirs', tome III sous la dir. de C.  Bonneuil et D. Pestre 'Le siècle des technosciences (depuis 1914)', Paris, Seuil, 2015 et dans une approche qui évoque les développements de l'intelligence artificielle : Brynjolfsson E. & McAfee A., 'The Second Machine Age: Work, Progress, and Prosperity in a Time of Brilliant Technologies', W. W. Norton & Company, 2014
(31) Séris J-P, 'La Technique', coll. quadrige, Paris, PUF, 1994
(32) 'La contribution de Nobel français au débat sur la recherche. La crise de la recherche académique, une opportunité de changement', Le Monde, 9 mars 2004. Dans un plaidoyer en défense du CNRS ('Notre avenir dépend de la recherche fondamentale', Le Monde, 11 fév. 2005) son président, Edouard Brézin, cite le cas du physicien Albert Fert, nobélisé en 2007 pour la découverte de la magnétorésistance des couches minces (mémoire numérique). L'argument semble court, on note que son laboratoire est financés par 'Thalès', un fleuron  du complexe militaro industriel.
(33) Voir : 'Physique et recherche médicale, le CEA et l'instrumentalisation des sciences du vivant' (HISTRECMED, 5-2017).
(34) En 2002, le ministre chargé de la Recherche, François D'Aubert, profite de l'inauguration de l'institut 'Minatech' consacré aux NBIC au CEN-Grenoble pour annoncer le projet d'Agence nationale de la recherche (ANR). L'installation de l'Agence Nationale de la Recherche en 2005 coincide avec un redressement du BCRD qui tombé à 2% du PIB en 2004 se stabilise 2.25 % à la fin des années 2000 (2.45 %  aux E-U, 2.80 % en Allemagne en 2010)
(35) Beffa, J-L, 'Les conditions d'une nouvelle politique industrielle', rapport au Pdt. de la République, Le Monde, 5 janv. 2005
(36) Prost A, Cytermann J-R, 'Une histoire en chiffres de l'enseignement supérieur en France', Le Mouvement social, 233. 4. 2010
(37)  Floch B., 'Le  Cambridge français remis sur les rails', Le Monde, 24 déc. 2015,  'Paris-Saclay : Macron acte le divorce entre Polytechnique et les universités', Le Monde, 27 oct. 2017
(38) Picard J-F, Mouchet S., 'La métamorphose de la médecine', PUF, 2009.

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